Germaine et Sarah 1943
Matériaux textuels : Archives dont la correspondance de Sarah Romentz et Germaine Guillotin, les articles de la Société d’Histoire d’Elbeuf…
Conception, mise en scène et textes additionnels : Eva Doumbia
Création musicale : Lionel Elian
Avec : Julien Frégé et Olive Malleville
En juin 2022, le musée Fabrique des Savoirs (Elbeuf) nous avait commandé une mise en espace à partir de la correspondance (datant de 1943) entre Sarah Rotmentz et Germaine Guillotin, deux jeunes elbeuviennes, dont l’une fut déportée. Ce spectacle était en lien avec l’exposition de l’artiste Iris Sarah Schiller, hommage aux femmes dans la Shoah, et a été l’occasion de rappeler l’horreur de cette période ainsi que les conséquences du racisme et de l’antisémitisme aux plus jeunes générations. Nous avons souhaité continuer ce travail avec de jeunes comédien.ne.s, dans un contexte d’oubli des drames du 20ème siècle et de résurgence du racisme (y compris inter-communautaire). Aussi nous proposons un spectacle de facture légère qui peut être aussi bien présenté dans les théâtres que dans les médiathèques et établissement scolaires. Cette performance pourra être suivie de débats notamment en milieu scolaire, de rencontres avec des historien.ne.s et chercheur.se.s
CONTEXTE
L’histoire de cette correspondance pourrait être le début d’un film ou d’un livre. La société d’Histoire d’Elbeuf, une institution locale composée d’historiens professionnels et amateurs avait publié en 1994 un numéro sur les juifs d’Elbeuf pendant la seconde guerre mondiale. Un article est constitué d’une liste indiquant les noms des personnes déportées en camp de concentration ainsi que des éléments biographiques les concernant. En dessous du nom « Sarah Romentz », il est indiqué le peu d’éléments connus sur la vie de cette jeune fille. Quelques mois plus tard, les historiens reçoivent un courrier d’une vieille dame. Elle s’appelle Germaine Guillotin et possède depuis plus de 50 ans les lettres que lui avait envoyées son amie Sarah, alors à Drancy. Celle-ci fut déportée en camp de concentration en janvier 1943 où elle décéda en mars. Mises en contexte, ces lettres retracent la chronologie des événements qui ont mené à la déportation de 92 personnes juives vivant et travaillant à Elbeuf, puis à la mort ou la disparition de 34 d’entre elles. Il n’y a que cinq missives, mais le travail de la Société d’Histoire d’Elbeuf nous fournit la matière à mettre en perspective, situer dans le temps et la géographie. La teneur de ces courriers, leur quotidienneté, leur facture simple nous informe avec précision de la réalité de ce qu’a été ce moment, comment les personnes déportées vivaient cette situation. Cela permet d’interroger la manière dont la banalité s’insère dans des moments avant qu’ils ne deviennent historiques.
Argument
La blessure de la Shoah est encore active dans les pays occidentaux. C’est une faille que l’on ne touche pas, un endroit sacré. Pourtant, cette sacralisation produit un sentiment d’injustice chez les jeunes issus de l’immigration post-coloniale, à majorité musulman.es, comme s’il y avait une hiérarchisation des victimes, comme si la mémoire des déportés avait plus de valeur que celle des descendants d’esclaves ou de colonisés. De plus le conflit israélo-palestinien a pour conséquence une relativisation de l’horreur de la Shoah. Or, chacun de ces crimes contre l’humanité possède la même matrice idéologique : le racisme. Les lettres de Sarah à Germaine m’ont bouleversée, et c’est ce bouleversement que je veux partager. C’est pourquoi, alors que je suis connue pour mon travail sur les récits oubliés concernant les afro-descendants, les questions liées à la colonisation et ses conséquences, je sors du cadre qui serait le mien en abordant cette part de l’histoire de France (la collaboration) et de l’Europe.
Mise en scène
Dès les premières lectures, la question de la forme s’est posée à nous. Et la réponse qui s’est imposée est la sobriété, la nudité des mots, la brutalité de ce qui est raconté. Les lettres n’ont besoin d’aucun artifice pour parler, les archives également. Aussi, trois jeunes comédien.ne.s les prennent en charge le plus simplement possible.
Il y a deux espaces qui correspondent à deux parties.
Le public est divisé en deux groupes. Chacun des deux regarde une partie puis on inverse. D’un côté une jeune femme, habillée comme en 1943, avec une bicyclette (Sarah Romentz parle de son vélo) : c’est Germaine Guillotin. Elle raconte comment elle a reçu les lettres et les lit.
L’autre espace est une installation, avec des archives. Deux jeunes acteur.ices nous guident et lisent les articles, donnent les faits historiques. Ils rendent hommage aux victimes.
En fin de parcours les deux groupes sont réunis et une discussion est proposée.
Elle peut être animée par des chercheur.euses ou des historien.nes.
Adresse
Théatre des Bains Douches
17 Rue Théodore Chennevière
76500 Elbeuf
Tél : 09 81 24 99 15
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Infos pratiques
Gratuit sur réservation
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